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10 septembre 2007

Et puis après... 3 (fin)

Un soleil froid l’accueillit à son réveil. Pendant quelques secondes elle se demanda où elle était, ce qui était arrivé. Peu à peu les souvenirs confus et douloureux de la veille lui revinrent en mémoire.

Elle s’étira sur le lit et se frotta les yeux. Elle se sentait faible et honteuse. Elle avait froid. Elle avait même aussi un peu faim.

Elle avait dormi d’un sommeil lourd et sans rêves. Sans cauchemars non plus. La fatigue avait fini par avoir raison d’elle. Et l’avait raisonnée aussi. Elle se sentait étrangement calme après le désespoir de la veille. La douleur était toujours là mais moins forte, la colère ne l’avait pas quittée mais elle s’était affaiblie. Il n’était jamais bon de tout garder au fond de soi, et s’abandonner un moment à la douleur l’avait finalement en partie soulagée.

Maintenant que cela était fait, elle pouvait se relever et repartir. Ses idées étaient plus claires, ses intentions mieux définies. Elle saurait à présent trouver la voie à suivre et s’y tenir avec toute la rigueur dont elle avait toujours fait preuve.

Elle se redressa, passa une main dans ses cheveux en soupirant. Elle s’arrêta quelques minutes, le temps de remettre ses idées en place et de réfléchir calmement à ce qu’elle allait faire. Il lui sembla qu’elle envisageait pour la première fois depuis la douloureuse nouvelle une action raisonnée et raisonnable. Si elle ne trouva pas sur le moment de ligne générale à adopter, le simple fait de penser, de se représenter des idées claires, la rassura. Elle ne se laisserait plus abattre.

Elle songea à ce qu’elle devait faire. A tout ce qui l’attendait. L’enquête, les autres qui suivraient ; son nouveau rôle, la place qu’il lui avait laissée en partant ; les questions, les rares réponses…

Et puis, dans quelques jours on l’enterrerait. Alors tout ce qu’elle avait vécu depuis sa disparition et qui ne devait être que temporaire deviendrait définitif. Il fallait qu’elle s’y prépare.

Elle se leva du lit et quitta la pièce. Dans le salon, elle nourrit les poissons et alla trouver elle-même de quoi manger. Elle  resta assise pendant de longues minutes sur le canapé à prendre son petit déjeuner, à respirer le calme de la journée, à ne se concentrer sur rien, à oublier une partie de sa douleur.

Le temps l’avait de nouveau prise dans ses bras. Il l’avait détachée de ses tristes instants, délivrée des sensations oppressantes et douloureuses de la veille. Elle pouvait avancer, reprendre sa vie, respirer, se laisser pousser par les secondes qui passaient. Elle était revenue parmi le monde qui battait autour d’elle au rythme de son cœur. Elle était toujours en vie. Elle continuait de vivre. Elle survivait.

Elle passa dans la salle de bain. L’eau coulait sur elle, caressait son corps et la dessinait, la rendait bien vivante, consistante, tout comme la brise du temps qui la traversait de nouveau. Elle n’avait plus peur.

Elle sortit de la douche, s’habilla. Elle surprit alors son reflet dans le miroir… Elle s’arrêta quelques instants.

Dans la glace, son ventre commençait à s’arrondir.

Elle portait une partie de lui en elle, un être qui n’en était pas encore totalement un, un être qui lui rappellerait toujours, un être qui l’attacherait à jamais à son passé, à ce qu’ils avaient vécu, à ce qu’il lui avait donné. Pourtant cet être la mènerait vers l’avenir, la pousserait en avant. C’était un morceau du passé, et cependant c’était tout son avenir qui était là, qu’elle contemplait à travers le miroir.

Bien sûr que non elle ne pourrait jamais guérir totalement. Bien sûr qu’elle n’oublierait pas. Elle aurait toujours en elle, près d’elle, quelque chose qui lui rappellerait…

C’est pour ça qu’elle ne pouvait pas se laisser aller. Il fallait qu’elle se batte. Depuis des années, elle ne faisait plus ce métier que parce qu’il était là, parce qu’il lui disait, parce qu’elle lui faisait confiance... Elle le suivait par instinct. Elle n’avait jamais vraiment compris…

Maintenant elle savait. Elle savait ce qu’il avait ressenti quand l’être le plus cher au monde lui avait été enlevé. Il avait perdu sa sœur. Elle l’avait perdu, lui. Elle était liée à ce métier, à cette mission. Ce n’était plus une question de devoir ou d’amitié. C’était dans son sang, dans son cœur, dans son être tout entier. Chaque seconde qui la ranimait, chaque souffle qu’elle respirait, chaque parcelle de vie portait cette sensation au plus profond d’elle.

Sa carrière, sa vie, n’avait plus d’importance. Elle se battrait pour que personne ne souffre plus comme elle ou lui avait pu souffrir. Elle se battrait pour arrêter tout cela. Elle se battrait pour la vérité. Et quand elle l’aurait trouvée, quand elle aurait accompli cela, alors elle pourrait enfin s’arrêter, se poser. Elle pourrait être fière d’elle. Elle pourrait penser à lui. Elle pourrait lui dire qu’ils avaient réussi. Elle pourrait s’arrêter et le rejoindre.

Mais elle ne le pourrait que quand elle aurait achevé. En attendant, elle avait beaucoup de choses à faire.

Elle sortit de la salle de bain, rassembla ses affaires. On l’attendait.

Elle jeta un dernier coup d’œil dans l’appartement.

Elle ferma la porte, tourna la clé dans la serrure.

Elle pouvait commencer.

Jamais elle ne renoncerait.

Jamais.

Il serait toujours là.

Toujours.

THE END

TC

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